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Yona Friedman, Animal normal (sortie prévue printemps 2013)
réalisation Caroline Cros et Antoine de Roux

Yona Friedman figure parmi les personnalités les plus emblématiques de la seconde
moitié du XXeme siècle tant dans les domaines de la pensée, que de la pédagogie ou
encore de la recherche d'une nouvelle liberté formelle, émancipée des dogmes et des
idéologies.
Ayant seulement construit un lycée à Angers et plusieurs pavillons éphémères en Inde, il fait pourtant partie des architectes et des théoriciens les plus influents d’aujourd’hui. Il est ainsi devenu une figure de proue pour toute une génération d’artistes vivants, qui le sollicitent pour des expositions collectives, des collaborations ou encore des rencontres plus informelles. Ses écrits, dessins et maquettes ont été largement diffusés ces dernières années par des commissaires internationaux, amoureux des utopies, que ce soit Okwui Enwesor, Jean-Louis Maubant ou encore Hans Ulrich Obrist. Si la pensée et le langage plastique de Yona Friedman font aujourd'hui l'objet d'une relecture, comme en témoignent les nombreuses invitations aux expositions et biennales internationales (Documenta à Cassel, Biennale de Venise, Triennale de
Yokohama), c’est justement parce que sa pensée et sa manière de la transmettre (manuels avec dessins simplifiés et textes, maquettes d'études, nombreuses publications, conférences et enseignement), donnent et réinventent des repères universels et fondamentaux dont notre époque s'est éloignée.
Depuis le milieu des années 1990, un certain nombre d'expositions collectives comme
Post-Human à Turin, ont montré la nécessité pour les artistes de revenir à des oeuvres ouvertes, humbles, permettant au public d'être de plus en plus actif, en vue de le placer dans une posture de créateur non pas au sens formel mais au sens politique, c'est-à-dire en lui faisant prendre conscience de sa responsabilité. Plaçant au coeur de ses recherches l’individu en tant que créature unique et indispensable au bon équilibre de l'univers et de ses lois insondables, avec toutes ses capacités, aspirations et potentialités, son travail et sa pensée sont fortement tournés vers les autres, d'un point de vue sociologique, philosophique et poétique, tout en
proposant un regard expansif sur l’état du monde, les espaces que nous créons et
occupons pour l'élaboration d'une véritable démocratie partagée.

Fragile certes, mais joyeux, gourmand, d’une vivacité d’esprit bien juvénile, s’exprimant dans un français subtil (nous faisant l’éloge de la “complication” contre la “complexité”…), Yona Friedman, qui vit, au milieu du 15 eme arrondissement de Paris, dans une sorte de grotte magique entièrement décorée d’objets qu’il a fabriqués et qui nous dégoulinent dessus dès qu’on en franchit le seuil, est un homme fascinant.
Il a traversé tout le siècle et ses différentes ruptures, qu'elles soient artistiques, intellectuelles, sociales ou politiques, avec toujours ce courage, dans ses choix, de rompre, dès le début, avec les idéologies dominantes pour proposer une vision nouvelle du monde : apologie du hasard et du "capricieux", de l’instant présent, de la patience, du détachement, de la responsabilité individuelle, de la modestie, du retrait, de la pensée à très long terme. Architecte qui n’a jamais vraiment voulu construire, rêvant à ses “utopies réalisables”, il est fasciné par les choses toutes simples comme la façon de penser d’un chien ou le ressenti d’un bébé, par l’art de faire la cuisine, par la magie de l’improvisation d’où il lui semble que ce sont là les enseignements fondamentaux.

Nous avons tant de questions à lui poser. Pourquoi n’a-t-il jamais construit ? Mais, qu’est-ce que son art ? Ses utopies sont elles bien réalisables ? Est-ce bien de l’architecture ? La liste est longue, et au fil des entretiens, d’autres questions vont surgir. <<